Avec le manque de liquidités dans les banques, le calvaire des citoyens s’est intensifié. A Benghazi, le manque de liquidités dans les banques est très perceptible et il impacte lourdement le quotidien des citoyens. Certaines banques limitent les retraits à 300, voire 500 dinars par personne. D’autres ont préféré fermer. A Tripoli, les critiques à l’encontre de la Banque Centrale ne cessent de s’élargir et ont déjà pris la forme de protestations dans les places publiques. Salah, un enseignant de Benghazi, installé depuis quelque temps à Tripoli, justifie sa colère : « j’ai de l’argent dans mon compte, mais je ne peux pas le retirer. C’est inadmissible ».
Le président de la commission de gestion des liquidités à la Banque Centrale de Libye d’El Beïda, Ramzi Agha, explique cette crise par la guerre contre le terrorisme et la peur qu’elle a engendrée chez les citoyens, affirmant que la situation « pousse les citoyens à retirer toutes leurs économies des banques afin de faire face à tout imprévu ».
La BCL de Tripoli évoque également les plus de 220 attaques contre les agences, dont certaines meurtrières, pour justifier son incapacité à créer un équilibre entre les retraits et les dépôts.
Les experts indiquent que « la séparation quasi-totale en termes d’opérations de transfert d’argent entre les banque des zones Est et Ouest, la guerre et la perte de confiance en un rapide rétablissement de la sécurité et de la stabilité ont engendré une course vers le retrait des liquidités ». La BCL a également expliqué la crise par la circulation de 24 milliards de dinars en dehors du circuit bancaire, précisant qu’il s’agit de sommes stockées par des hommes d’affaires. Le dépôt de seulement 10% de cette fortune dans les banques mettra immédiatement fin à la crise de liquidités, affirme-t-il, estimant qu’il n’y a aucun signe de rétablissement rapide de la situation.
Le banquier a fait savoir que la BCL tente de régler le problème en encourageant les opérations de dépôt dans les circonstances exceptionnelles actuelles. Il a affirmé que les banques ont eu la permission d’activer, d’alimenter et de commercialiser les cartes bancaires et d’ouvrir le service de transfert d’argent (western union et Money gram), précisant que les mandats d’études ou de soins ne dépassent plus les 7500 dollars ou l’équivalent en devises. « Toutes ces opérations se font à travers le « numéro national » et sont contrôlées par le système de suivi de devises, créé récemment pour aider la BCL à détecter les fraudes », a-t-il expliqué.
Abdesslem Nasba, député de Zanten estime que la corruption qui s’est développée durant les dernières années a une importante part de responsabilité dans le manque de liquidités. L’octroi à quelques personnes de grandes quantités d’argent liquide n’a pas arrangé les choses. Le député a fait part de l’absence de la confidentialité au sein des banques, ce qui a permis la fuite des contenus des comptes de quelques clients. Ceci a engendré l’augmentation des crimes d’enlèvement et de braquages, outre la propagation d’armes. Il a accusé la faiblesse de l’Etat, incapable de faire respecter la loi.
L’expert économique, docteur Mohsen Derija, propose un plan sur le moyen terme pour sortir de cette crise, qui stipule d’engager les réformes visant à réduire la consommation de devises en subventionnant le carburant et quelques produits alimentaires, sujets de contrebande, de diriger l’appui aux citoyens les plus nécessiteux, de réformer le secteur bancaire pour qu’il puisse financer l’activité économique et d’avancer dans le projet de la gouvernance électronique.
L’homme d’affaires Hosni Bey pense que « l’unification du prix officiel de change ou l’imposition d’une taxe sur la vente de devises et la généralisation de son achat et vente incitera les Libyens à retourner aux banques, ce qui mettra fin au problème de liquidité », proposant « l’interdiction le troc de la subvention relative aux aliments par la monnaie ».
Quant à l’expert économique libyen Ali Salh, il estime que l’utilisation des cartes de crédit au quotidien est la meilleure solution pour le manque de liquidité, expliquant que ce système fera tourner la roue économique sans besoin de liquidité.
D’autres pensent que le dépôt de la liquidité nationale et étrangère dans les banques serait une solution rapide et efficace. Des experts indiquent que ceci nécessite le retrait de nombre d’anciennes monnaie locale et leur remplacement par le dollar, via le système du numéro national dans toutes les banques libyennes, ainsi que l’activation des cartes bancaires en dollars chez toutes les banques.
Toutes ces théories n’ont pas été concrétisées. Le pouvoir a recours à des méthodes plus pratiques. A l’Est, le gouvernement a obligé les cliniques et les opérateurs téléphoniques à faire les transactions en liquide. Entre-temps, le citoyen reste la victime, surtout avec l’arrivée du mois de Ramadan et les dépenses occasionnées.