Ne sachant que faire face à cette situation, les lois internationales en vigueur ne permettant pas l ‘extradition de mineurs non-accompagnés, le capitaine Sobeihi a préféré les garder au centre et contacter le bureau libyen de l’Unicef, pour trouver une solution.
« Ce n’est pas de notre faute »
Fatma, l’aînée, affirme à « Dunes Voices » qu’elle « est venue avec ses frères et sœurs, Ibrahim, Idriss, Halima et Hassna des faubourgs de la ville tchadienne de Biltine, chef-lieu de Wadi Fera limitrophe du Soudan, suite à un long périple à travers les épineux sentiers du désert ». « Notre mère est morte durant le voyage et nous sommes sans nouvelles de notre père depuis son arrestation par la police un mois après notre arrivée à Benghazi » ajoute-elle.
Fatma qui a refusé que « Dunes Voices » parle à ses frères et sœurs, affirme, en les gratifiant d’un regard triste : « Nous n’avons pas d’autre choix que de faire la manche pour subvenir à nos besoins… Nous avons besoin d’aide, alors ne soyez pas sévères envers nous ». Et d’ajouter : « Ma tante Zalia habite à Benghazi depuis des années… C’est pour cette raison que mes parents avaient choisi de venir ici, mais ma tante, qui est pauvre et qui a quatre enfants, ne peut pas nous prendre en charge… Alors elle nous permet juste de passer la nuit chez elle ».
La mendicité, un vrai phénomène
Le capitaine Sobeihi affirme avoir essayé de contacter cette tante, en vain. Il explique : « D’après notre expérience, il pourrait s’agir d’une femme appartenant à la même tribu… et généralement, elle refusera de prendre les enfants. Je dirai même qu’il est fort probable que ce soit elle qui les pousse à mendier pour son compte. La mendicité est devenue un véritable phénomène notamment devant les mosquées, depuis la relative accalmie à Benghazi. C’est pour cette raison que nous œuvrons toujours à confier les enfants à l’Unicef ».
Concernant la légalité de l’arrestation de Fatma et de sa fratrie, alors qu’ils sont mineurs, Nasser Sobeihi affirme : « Les lois libyennes concernant l’immigration sont incomplètes et ne concordent pas avec les normes internationales en matière de protection des enfants. Nos lois n’incriminent pas l’emprisonnement des enfants, notamment quand il s‘agit d’immigrés clandestins ou de réfugiés » ajoutant que « la loi en Libye est très sévère à l’égard du phénomène de la mendicité même quand les mendiants sont des enfants. En fin de compte, le rôle du pouvoir exécutif est d’appliquer la loi même quand elle ne respecte pas les normes internationales ».
Abdelmenem Elhorr, expert en immigration clandestine, affirme pour sa part que nombre de juristes libyens ont fait des propositions pour remédier au problème de l’emprisonnement des migrants clandestins mineurs mais que toutes les initiatives ont échoué à cause de l’absence d’institutions en mesure de changer dispositif législatif et de l’aligner sur les normes internationales.