Le représentant des Nations-Unies pour la Libye, Bernardino De Leone, est parvenu à arracher un accord de la part des principales factions libyennes sur ses dernières propositions pour la sortie de la crise en Libye. « C’est un premier pas vers la finalisation de la transition politique et l’édification d’une Constitution permettant l’accès à la démocratie », a souligné De Leone, en insistant sur le fait que « la porte reste ouverte à ceux qui sont absents aujourd’hui » et en miroitant aux absents que « jamais un accord n’est définitif et qu’il peut faire l’objet de rectifications ».
La dernière proposition de De Leone a été signée, en premières lettres, par la délégation du parlement de Toubrouk, ainsi que par les représentants des députés réfractaires, notamment ceux de Misrate. Ont été également présents pour valider cet accord les maires des principales villes libyennes à l’image de Tripoli, Benghazi, Sebha, Misrate, Zliten, Ajdebia et Mislata, ainsi que les représentants des deux principaux partis politiques : l’Alliance des forces nationales de Mahmoud Jibril et le parti de la Justice et la Construction, bras politique des frères musulmans.
L’absence du Congrès national général (CNG) à la cérémonie de signature a été pressentie. Le communiqué publié par le CNG suite à la discussion du Draft 4 (modifié) a insisté sur « la nécessité de respecter le jugement de la Cour suprême et les procédures pour la nomination du chef de l’état-major des armées ». Il était clair que le Congrès national général de Tripoli refusait de ne pas être traité sur le même pied d’égalité que le parlement de Toubrouk.
« Or, De Leon essayait, certes, de rapprocher les points de vue. Mais, il gardait dans la tête le fait que le parlement de Toubrouk est le corps légitime, aux yeux de la communauté internationale », remarque le membre du congrès, Abderrahman Dibani, qui reproche à l’émissaire de l’ONU « d’ignorer le fait que la Cour suprême libyenne ait annulé les résultats des élections du 25 Juin 2014 ». Dans une nouvelle lettre adressée à De Leon, le Congrès national général a réitéré « sa disponibilité à retourner au Dialogue, si les modifications qu’il a présentées dans sa dernière lettre, sont validées ».
Par contre, le représentant du parlement de Toubrouk, Mohamed Chaïeb, a insisté après la signature de l’accord que « cela annonce la fin de la scission des institutions en Libye et l’orientation vers une réconciliation nationale sans vainqueur, ni vaincu ». Même son de cloche de la part du représentant des députés réfractaires, le représentant de Misrate, Fathi Bach Agha, qui a considéré que « cet accord signifie que la solution ne peut jamais venir d’un seul bord et que l’apport de tous est nécessaire pour reprendre en main l’avenir de la Libye ». Il est à souligner que Bach Agha et le maire de Misrate ont signé malgré leurs réserves par rapport à la nomination de la hiérarchie militaire, laissée aux mains du parlement, qui risque de laisser le général Haftar à sa place, ce qui risque de soulever l’animosité de la région Ouest.
Par ailleurs, cet accord a été favorablement accueilli par la communauté internationale. Ainsi, les ambassadeurs des pays (5+5) ont publié un communiqué, repris sur la page Fb de l’Ambassade des Etats-Unis en Libye, où ils « approuvent la responsabilité et le courage de ceux qui ont franchi ce pas et appellent les hésitants à les suivre ». Ce communiqué a émané des ambassades de l’UE, Canada, France, Allemagne, Italie, Portugal, Russie, Espagne, GB et USA, suite à une réunion tenue à Sekhirat en marge de l’avancement du dialogue entre les factions libyennes.
Il reste maintenant de savoir comment cet accord va être perçu sur le terrain, où les combats font toujours rage du côté de Benghazi entre les troupes du Général Haftar et celles proches de Daech. Autour de Syrte, les troupes de Daech essaient de renforcer leurs positions. Elles ont avancé d’un rayon de 60 kilomètres vers l’Ouest (Misrate), l’Est (les zones pétrolifères) et le Sud. La ville de Misrate n’est pas à l’abri d’une éventuelle attaque. Elle a déjà fait l’objet la semaine dernière de deux attentats-suicides.
La partie est loin d’être gagnée.