Si l’implication des forces spéciales britanniques dans les combats contre Daech autour de Syrte en Libye a aidé les troupes libyennes à récupérer les villages occupés par les combattants de l’Etat islamique, il a néanmoins mis à nu la présence de forces étrangères en Libye. Pourtant, le ministre de Défense britannique Michael Fallon a déclaré, au milieu du mois de mai, que « la Grande-Bretagne ne prévoit pas un ‘rôle de combat’ pour ses troupes en Libye ». Il a précisé que : « si l'armée devait être déployée en Libye, le Parlement va d’abord en discuter ». Or, deux jours après ces déclarations, le Times a rapporté que les troupes spéciales britanniques (SAS) sont déjà en Libye et ont été vus le 12 mai faire sauter un véhicule de Daech chargé d'explosifs près de Misrata à l’aide d’un missile Javelin.
Par ailleurs, le Times s’est référé dans ses révélations à Mohamed Dharrat, un chef de guerre libyen, opérant au sein des troupes chargées de libérer Syrte. Ce militaire a déclaré composer directement avec des Britanniques et des Américains. Il a fait le même récit au correspondant de Dune-voices et mis l’accent sur le fait que les troupes spéciales britanniques (SAS) ont sauvé, le 12 mai, la vie de soldats libyens dans la localité de Ouichka ( Sud-Est de Misrata) en faisant exploser deux voitures de Daech, bourrées d’explosifs.
« Alors que mes soldats ne savaient que faire face aux voitures s’avançant vers eux, les Britanniques ont maitrisé la situation avec un missile », a précisé Dharrat. D’autres informations ont pourtant rapporté que c’étaient les forces libyennes qui ont détruit des voitures bourrées d’explosifs de Daech. « Les dernières informations vont dans le sens de cacher la présence de forces étrangères en Libye, en prétendant que c’étaient des Libyens qui font le boulot », explique le politologue Ezzeddine Aguil.
Les informations libyennes n’ont pas convaincu les médias britanniques et internationaux. Ainsi, l’Editorialiste britannique, Rori Donaghy a écrit : ‘Il est temps pour un débat parlementaire sur les guerres secrètes de Grande-Bretagne en Afrique du Nord (Libye) et au Moyen-Orient (Yemen, Syrie et Irak)’. De même pour le président de la commission des Affaires étrangères au parlement britannique, Christian Planet, qui a demandé, pour sa part, des précisions sur le rôle des forces spéciales en Libye.
Les forces de Daech ne cessent d’enregistrer des pertes dans leurs combats autour de Syrte. Les dernières nouvelles du terrain, relayées par le correspondant de l’Agence Dune-voices, indiquent que le rond-point Al Baghla, situé à 50 kilomètres de Syrte, est désormais entre les mains des forces de Misrata. Il s’agit du dernier carrefour menant de Syrte vers l’Ouest libyen.
Cette bataille a coûté cher en hommes et en matériel aux forces de Daech. Leur coordinateur général en Afrique du Nord, l’Algérien Khaled Chayeb (alias Lokman Abou Sakhr), serait mort dans cette bataille. Chayeb serait le chef suprême des katibas de Tunisie et d’Algérie et serait même la tête pensante de l’attaque du musée du Bardo le 18 mars 2015 en Tunisie.
A noter toutefois, remarque le correspondant de Dune-voices que le ministère tunisien de l’Intérieur avait annoncé la mort de ce combattant le 29 mars 2015 dans un guet-apens près de la ville de Gafsa. Dans tous les cas de figure, et au-delà des noms, les troupes de Daech ont subi des revers importants dans cette région. Les forces de Misrata se sont positionnées dans ce rond-point, arraché des mains de Daech. Les forces loyales au gouvernement de Sarraj attendent les renforts avant de reprendre leur offensive vers Syrte.
Par ailleurs, l’envoyé spécial de l’ONU en Libye, Martin Kobler, a estimé le 28 mai dans une interview reprise par Al Arabya, que les forces de Daech en Libye sont entre quatre et cinq mille hommes, dont deux à trois mille se trouvant à Syrte, alors que les autres sont dans les autres villes libyennes. Kobler a attiré l’attention au fait qu’une semaine plus tôt, une cellule dangereuse de Daech a été démantelée à Tripoli. La spécificité du danger provient de liens avérés entre cette cellule et le groupe Poko Haram, d’où la nécessité de contrôler le développement de Daech en Libye, a insisté Kobler.
Sur un autre niveau, et alors que le chef du gouvernement de réconciliation, Fayez Sarraj, ne cesse d’obtenir des signes de soutien international, le dernier lui est parvenu de la ligue arabe, le même Sarraj ne parvient pas à s’imposer en Libye. Toutes les initiatives, en provenance de plusieurs camps libyens (Est, Sud, Djebel Gharbi) insistent sur la nécessité de remanier l’équipe gouvernementale. Kobler, lui-même, aurait fini par prêter l’oreille à de telles rectifications du processus en cours, tant la situation n’a pas évolué.