Au terme de l’année 2015, les statistiques du Conseil Régional du Tourisme du Souss Massa affiche une chute de plusieurs marchés émetteurs. L’analyse du cumul des nuitées et des arrivées de l’année 2015 par rapport à l’année 2014 fait ressortir une baisse de 2,15 % en arrivées et de 8, 71% en nuitées. Le taux d’occupation a également chuté de 5,99% toujours en comparant les performances de l’année 2014 et 2015.
Selon les mêmes chiffres, c’est le marché national qui sauve, aujourd’hui, la mise avec 36,19% alors que le marché français n’a atteint que 16, 41 %, le marché allemand 8, 95 % , le marché polonais 4,91% et le marché russe 1,27 %. Cependant, pour mieux cerner la dégringolade, qu’a connue la destination, il est essentiel de revenir au développement des marchés classiques de la destination, ces dernières années. Nous prenons à titre d’exemple le marché russe et le marché allemand. Deux marchés sur lesquels la destination a perdu son attrait. En effet, le marché allemand avait atteint le pic en 2000 avec 152 464 arrivées. Il connaitra une chute qui continuera jusqu’en 2003 pour arriver à 60 972 arrivées. Malgré la hausse affichée en 2006 avec 76 857 arrivées et 86 241 en 2015, la destination n’est plus jamais arrivée à atteindre les 152 464 arrivées de l’année 2000. La destination connaitra la même perte de vitesse sur le marché russe. Au terme de l’année 2010 et 2013, la destination avait atteint 24 735 et 24 586 arrivées. La perte de parts de ce marché commencera en 2014 où les arrivées russes étaient de l’ordre de 16 894. Ils passeront à 6967 arrivées en 2015. La destination a également enregistré la même baisse vertigineuse pour le marché français, scandinave et polonais, ces dernières années. Le tourisme national est devenu l’unique sauveur qui se classe premier dans les statistiques.
Après établissement d’un diagnostic, suite à une journée de réflexion et des réunions d’urgence, les professionnels s’accordent sur plusieurs faits structurels et conjoncturels qui handicapent aujourd’hui la destination. « Le secteur du tourisme est un secteur très fragile. Nous sommes en perte de vitesse depuis des années. Il est vrai que les derniers attentats en Tunisie, la situation géopolitique qui s’annonce mal avec l’augmentation du risque terroriste sont autant de faits qui touchent le secteur directement mais la destination souffre de problèmes structurels qui se sont accumulés depuis plusieurs années. Preuve en est la floraison de ce secteur au niveau de la ville de Marrakech qui continue à séduire», souligne l’un des professionnels de la destination.
Ce même professionnel explique que la question du risque terroriste a été évoquée lors des dernières négociations entre les TO et les professionnels de la destination. Notons qu’une délégation de professionnels avait effectué une mission de reconquête des marchés russe, polonais et scandinave, fin 2015.
« La question du risque terroriste a été évoquée lors de nos négociations avec les TO est notre argument le plus fort est la grande stabilité du Maroc et le travail colossal qui se fait par nos services dans la lutte contre le terrorisme. Ce qui handicape la destination, aujourd’hui, est son manque de capacité litière, le vieillissement des structures d’hébergement, la concurrence accrue, le prix du packaging qui reste très élevé quand on le compare aux destinations concurrentes, son repositionnement sur les mêmes arguments de vente en tant que destination balnéaire depuis des années, notre inadaptation aux évolutions qu’a connu la e-commercialisation, le manque en matière de diversification des produits, l’aérien ainsi que le manque en matière d’animation », explique-t-il.
Par ailleurs, pour Angel, touriste allemande, le risque terroriste est une affaire de tous « J’ai choisi de venir passer quelques jours à Agadir et j’ai acheté mon package parce que je voulais visiter cette ville, depuis des années. Il est vrai que les consignes mettent les pays arabes en général dans la zone rouge suite à la situation géopolitique mais cela ne m’a pas fait changer d’avis. Le terrorisme est devenu un problème international et on peut être ses victimes ici comme ailleurs. Ce qui s’est passé à Paris le confirme. Personne n’est plus à l’abri ».
Un autre son de cloche de désarmement et de désespoir est exprimé par Ahmed, vendeur dans une boutique d’artisanat : « Finis les beaux jours d’Agadir ! Mon chiffre d’affaire n’a jamais connu une telle baisse. Si nous connaissions des crises saisonnières auparavant là nous mourons d’une crise continue en l’absence de touristes. La ville n’est plus ce qu’elle était. Il m’arrive continuellement de passer des jours sans vendre un seul produit. Nous luttons mais si la donne ne change pas d’ici peu nous serons obligés de fermer. »
Pour rappel, la destination avait renforcé son arsenal sécuritaire depuis en exigeant la mise en place des portiques électroniques, l’obligation d’installation des caméras de surveillance ainsi que le renforcement et formations des agents de sécurité. Par ailleurs, les professionnels de la destination avaient émis récemment des propositions pour sécuriser les canaux de circulation de touristes dans le secteur balnéaire entre les unités hôtelières tout en appelant à l’installation des caméras de surveillance dans la zone touristique et sur la promenade avec la participation des hôteliers pour ainsi assurer une sécurité maximale aux visiteurs et locaux de la destination. Le même appel a été lancé pour ainsi munir les quartiers de caméras. L’objectif étant de préserver le calme et la sécurité dans cette ville.
Aujourd’hui et suite aux négociations menées par l’Office National du Tourisme et les professionnels de la destination avec les T.O russes, fin 2015, la destination table sur 70 000 touristes russes au cours de l’année 2016. Le prix du package, qui reste plus cher de 35 à 40% par rapport aux destinations turques et égyptiennes qui laissent une grande marge de bénéfices aux T.O, connaitra une baisse pour tenter une nouvelle mission de séduction. Le CRT du Souss Massa s’est également lancé dans une stratégie de « Brainding » afin de se donner une nouvelle identité. « La destination s’est longuement positionnée sur ses atouts balnéaires et climatiques. Elle est aujourd’hui appelée à diversifier ses potentiels notamment en matière de tourisme durable, tourisme sportive et de bien-être afin de diversifier le produit. L’image de la destination a vieilli et nous nous retrouvons devant l’obligation de repenser notre positionnement sur les marchés émetteurs », souligne un autre professionnel de la destination.
Sur la liste des projets d’animation, la ville connaîtra l’ouverture de plusieurs parcs d’attraction en cours de validation et de construction pour booster son offre.