Aïdel, étudiante à la Faculté de droit Marrakech, pense que la culture sahraouie, surtout celle des hassanophones, n’est pas représentée dans la production télévisée marocaine. Les téléspectateurs sahraouis ne suivent plus les chaînes marocaines 1ère et 2M, à cause de cette exclusion. Aïdel indique que les acteurs sahraouis sont absents des petits écrans, «Pire: si l’un d’eux apparait, ce n’est que pour faire le figurant sans refléter la culture hassanophone» a-t-elle conclu.
Omar El Kou, acteur sahraoui, n’est pas loin de l’avis de la jeune étudiante. Selon lui, «la présence des acteurs sahraouis dans les feuilletons marocains n’exprime pas les problématiques sociétales ni les attentes culturelles de la communauté hassanophone ; Par ailleurs, l’image transmise reflète la réalité de manière approximative et superficielle». «A titre d’exemple, poursuit-il, dans la série télévisée ‘Nas Al Howma’ diffusée sur 2M au mois de ramadan passé, l’actrice Emal Bouvettah a interprété le personnage d’une femme sahraouie, mais cette interprétation de la culture hassane n’a pas dépassé le port du voile, habit traditionnel des femmes hassanophones, et l’accent austral».
Quant à Cheikh Loussy, journaliste originaire des Provinces du Sud, il dit que «la présence faible des acteurs sahraouis dans les scènes marocaines est du à un facteur linguistique et à l’accent sahraoui difficilement compréhensibles par le grand public». «Ceci est aussi valable pour la production amazigh, notamment dans les zones rurales» a-t-il ajouté.
Le Président de l’Organisation des libertés d’Information et d’Expression, HATEM, Me Mohamed Al Aouni, pense que les acteurs hassanes ne sont pas les seuls dont la présence sur les chaînes marocaines est faible: «cela concerne également leurs collègues amazighs». Selon lui «les tentatives de certaines productions télévisée marocaines d’impliquer des acteurs marocains de différentes communautés serait un indicateur positif pour refléter la diversité et la richesse, culturelles, qui caractérisent la culture marocaine, loin de toute exclusion ou discrimination».
Al Aouni souligne l’absence d’études et de rapports analytiques sur ce sujet. Il ajoute que «la faible présence des acteurs sahraouis s’explique par le fait que les acteurs de la région ne parviennent pas à s’impliquer dans le champ artistique avec des critères professionnels». Selon lui, l’angle de traitement approuvé dans plusieurs produits télévisés n’est pas compatible avec les caractéristiques des acteurs originaires des Provinces du Sud.
Pour Cheikh Loucy, la formation des acteurs des reste modeste au Maroc. Ce qui empêcherait une participation plus large et active de leur part. Il précise: «les acteurs des Provinces du Sud exercent par amateurisme et non par professionnalisme». Il ajoute que l’émergence à Lââyoun de quelques sociétés de production locales a fait que la production télévisée diffusée par la Chaîne régionale de Lââyoun n’a visé que le public sahraoui. Ce qui aurait abouti à la limitation de l’influence de l’acteur hassane. En plus, précise-t-il, la production télévisée marocaine n’est pas dotée de capacités financières et logistiques de nature à attirer des acteurs de différentes régions marocaines. Il attire l’attention sur le fait qu’il est extrêmement rare de tourner des scènes de feuilletons télévisés dans les provinces du Sud.
Mohamed Al Kebch, journaliste à la chaîne régionale Lââyoun, indique que la présence de l’acteur sahraoui reste intéressante dans les productions télévisées de la Chaîne de Lââyoun. Il justifie la faible présence de cet acteur dans les chaînes, 1 et 2, par le fait que la chaîne régionale est responsable de la plupart des productions télévisées.
Me Mohamed Al Aouni, de Hatem, n’exclut pas qu’il y ait des raisons politique derrière cet état de faits. Ces raisons seraient liées à la question du Sahara marocain. C’est un sujet très sensible.
Nous avons contacté un expert en sociologie. Celui-ci a refusé de divulguer des données à cet égard, évoquant l’absence d’études et de rapports fiables, à cause de la sensibilité du sujet. Ce qui a posé devant nous plus d’un point d’interrogation.
Ce refus ne constitue-t-il pas en soi une reconnaissance de l’approche d’exclusion adoptée ? Serait-ce du à l’absence de talents chez les sahraouis ? Ou bien il y a d’autres raisons non déclarées ?
Nous y reviendrons.