« Nous ne pouvons aller ni d’un côté ni de l’autre. Nous sommes coincés sans eau et nourriture » alertent des migrants dans un appel de détresse.
Sur la centaine de migrants refoulés, 34 ressortissants de Guinée, du Cameroun, du Mali, du Sénégal et de Côte d’Ivoire sont restés pris au piège sur le tracé frontalier entre les deux pays, après leur refoulement d’Oujda (Maroc Oriental).
« Nous vivons une situation ubuesque, nous ne pouvons aller ni d’un côté ni de l’autre. Nous sommes coincés sans eau et nourriture » informent-ils, angoissés.
Selon nos informations, corroborées par plusieurs organisations et associations de défense des droits humains, ces migrants subsahariens, appâtés par l’instruction du roi Mohammed VI adressée à son gouvernement en 2013, de cesser les refoulements et de régulariser les migrants sans papiers, se sentent floués et piégés.
Ces 34 migrants affirment avoir été arrêtés par la gendarmerie royale à Oujda, le 12 mars dernier et fichés. Ils ont été conduits «pour un contrôle d’identité, une prise d’empreinte et de photos » selon leurs témoignages. Ils ont été, ensuite, transportés dans un camp près de la frontière dans lequel ils sont restés trois jours avant d’être refoulés vers le no man’s land.
Selon les mêmes témoignages « les forces de l’ordre marocaines leur ont pris leurs passeports et leurs effets personnels (argent, téléphone…) avant de les refouler vers le no man’s land ».
Selon la Ligue algérienne pour la défense des droits de l’homme (LADDH), la SNAPAP, l’association marocaine des droits humains (AMDH) et le Groupe antiraciste de défense et d'accompagnement des étrangers et migrants au Maroc (Gadem), ces arrestations et conduites de force à la frontière ont été accompagnées de violences de la part des forces de l’ordre marocaines. Des violences commises par les forces de l’ordre algériennes ont également été signalées par les personnes ayant tenté de passer de l’autre côté de la frontière militarisée.
Dans un communiqué commun, ces organisations indiquent que « ces arrestations et refoulements interviennent dans un contexte de répression croissante à l’encontre des personnes migrantes dans les régions de Tanger-Tétouan et Nador (Maroc) depuis ces derniers mois » et ce, en contradiction totale avec la politique migratoire « humaniste » promue par les autorités marocaines depuis septembre 2013.
La LADDH, bureau de Tlemcen, lance un appel aux autorités du pays : « Nous sommes interpellés par la communauté des migrants subsahariens à Tlemcen qui demande le respect en tant qu’être humains et le respect par les responsables de la wilaya de Tlemcen des conventions internationales que l'Algérie a ratifiées ».
Selon nos informations recueillies auprès de migrants à Maghnia parmi lesquels deux faisaient partie du groupe refoulé ayant réussi à passer la frontière de nuit, « un groupe de subsahariens a réussi à s’introduire sur le territoire algérien », mais l’on ignore, à l’heure qu’il est, le sort d’autres abandonnés sans vivres, au niveau du no man’s land entre l’Algérie et le Maroc.
La frontière terrestre entre l’Algérie et le Maroc est fermée depuis 1994. En dépit des appels répétés des citoyens des deux côtés de la barrière pour sa réouverture, au vu des liens familiaux algéro-marocains, les gouvernements des deux pays font la sourde oreille.
Chahreddine Berriah