Cinq ans plus tard, des spécialistes… et des entreprises ayant effectué cette tâche, crient au scandale… mais, pas pour les mêmes raisons. Enquête !
« Les autorités algériennes, bousculées par le temps, ont confié la restauration de plusieurs sites millénaires à des non spécialistes, autrement dit à des maçons qui n’ont rien à voir avec la profession et c’est peu dire… » entame un architecte, le ton amer.
Selon notre interlocuteur « Le minaret de la grande mosquée, construite il y a plus de neuf siècles par le sultan Youssef Ibn Tachfin, a viré de la jolie couleur ocre d’origine vers le blanc. En outre, la pose de la clôture en pierres de taille suscite des interrogations car, elle va reléguer au second plan le monument en question »
Réponse creuse immédiate –sans convaincre- du conservateur principal du patrimoine : « un plan permanent de protection des vestiges archéologiques du site de Mansourah au même titre que la médina de Tlemcen, a été mis en œuvre afin de valoriser ce site historique en préservant son cachet ».
M. Morsli Bouayed, président de l’association pour la sauvegarde et la promotion de l’environnement de la wilaya de Tlemcen (Aspewit) n’y va pas avec le dos de la cuillère « Il n'existe pas d'opportunité pour clôturer un site historique sachant qu'une clôture reléguera le monument en second plan. Il aurait été plus souhaitable de bâtir une enceinte transparente, neutre et sans apports de poteaux de béton et de fer forgé. Maintenant après cette mascarade architecturale, je crains que cette clôture va libérer de l'espace qui va être convoité.».
Pour M. Bouayed, pour ce qui est des terrassements, « il aurait fallu tout simplement garder la topographie naturelle du site et mettre du gazon... »
Par ailleurs, cette opération de restauration des vestiges n’a pas suscité la colère et l’indignation des spécialistes seulement, mais aussi… des entreprises ayant été sollicitées pour cette tâche.
« En 2010, les autorités locales nous avaient confiés la restauration des sites, avec la promesse d’être payées au fur et à mesure de l’avancement des travaux. Nous avons honoré notre mission en un temps record, mais depuis, nous n’avons pas reçu l’ombre d’un centime. Selon le wali de Tlemcen, notre travail a été effectué dans un cadre culturel et donc c’est au ministère de la culture de payer nos factures. Contacté, ce dernier s’est montré étonné en affirmant que « pour « Tlemcen, capitale de la culture islamique » l’Etat a mis 10 millions de dollars pour toute cette manifestation, y compris les travaux de restauration, en plus des activités, de l’hébergement, les cachets des artistes et toutes les charges afférentes à cette manifestation et donc, c’est de cette manne financière qu’on devait être payés. Le problème, on ne sait pas qui est le responsable de cette manne. Le wali de Tlemcen nous tourne le dos, le ministère de la culture nous dit qu’il n’est pas concerné et le commissaire de ladite manifestation aussi. Depuis, nous sommes ballottés d’une tutelle à une autre… » s’indignent des entrepreneurs.
Force est de croire, aujourd’hui, qu’une fois les lumières éteintes sur cette « capitale islamique » aucun n’est satisfait, ni les artistes, encore moins les entreprises. Et de se demander : à quoi a servi cette manifestation ?