Une oasis dénommée, aussi la babylonienne dont l’histoire est jonchée de mille et une histoire. Une cité millénaire à l’architecture arabo-soudano-subsaharienne
Reconnue pour la tolérance et l’hospitalité de ses humbles habitants. Ce qui a fait d’elle un lieu de transit, une terre d’asile pour des réfugiés venant de contrées lointaines.
En franchissant les portes de ce ksour (palais ou château) comme on l’appelle ici, on prend soin de ne pas violer la quiétude des autochtones. Un silence de sépulture y règne, ce qui vous met en face et dans un environnement religieux.
«Tamentit a accueilli des légions d’étrangers depuis le premier siècle de l’ère chrétienne, avec les fameuses pistes romaines passant à l’Est (désert libyen, Gabès, Tunisie...) ; les pistes du Moyen-Orient, ouvertes par des juifs fuyant l’empire de Constantin après le massacre de Massada ; celles de l’Afrique noire ou encore les chemins de Beni Abbès, Béchar menant via l’Atlantique vers l’Espagne, le Portugal et même au royaume d’Angleterre » nous rappelle Smaïl K.
Mohamed Kali, journaliste et écrivain évoque avec passion cette contrée mystérieuse « Tamentit est une lourde météorite, une demi-tonne de métal découverte à travers le monde. Elle gisait à demi enfouie dans le sable sur l’une des places publiques de l’oasis.
Elle était tombée entre la fin du 14è siècle et le début du 15è à 12 kilomètres de Tamentit. Elle y était rapportée et fut l’objet d’une adoration plus superstitieuse que religieuse. Depuis des siècles, une foule de femmes désireuses d’avoir un enfant, se sont assises sur la pierre sacrée… » Légende ou vérité, toujours est-il que cette agglomération dort sur des trésors inestimables. « Elle est réputée pour ses khizanat (bibliothèques) recelant d’anciens manuscrits d’une immense valeur, explique davantage Smaïl K.
« La khizana de Sid El Bekri, penseur et fondateur de la zaouïa de la confrérie El Bikria, en l’an 1043 de l’hégire (1646), fait aussi office d’école coranique fréquentée anciennement par des apprenants africains venant de pays subsahariens. Aujourd’hui, ce sont 440 élèves entre internes et externes qui viennent y parfaire leur initiation théologique. Cette khizana s’enorgueillit de posséder l’un des plus anciens manuscrits de la région, datant du Xe siècle.
Il s’agit d’un Othmania, un Saint Coran ramené par le premier ancêtre des Bekraouine, Sidi Amar Ben Mohamed. Un Coran écrit en ancien arabe avant la vocalisation. L’autre ouvrage prisé dans la région est celui des Makamat El Hariri, un livre précieux sur la rhétorique (el balagha) importé d’Egypte, aux côtés d’autres portant, toujours, sur la théologie, la sociologie, la médecine (chirurgie rudimentaire et empirique), la géographie, l’astronomie, la littérature... Il faut rappeler que la grande période de production de manuscrits à Tamentit a été le 16e siècle. »
Comme un lieu de pèlerinage, Tamentit, pourtant, livre très peu ses secrets. Ses habitants pudiques ou discrets sur leur histoire donnent l’impression qu’ils aiment laisser le visiteur découvrir leur antre, leur us… sans mot dire.
Ici, on raconte qu’un juif, très vénéré sur les lieux, pendant de longues années, s’est joué de la population en disparaissant un matin sans crier gare, emportant avec lui des trésors. Et lorsque l’on tente de rappeler cet épisode de l’histoire, nos interlocuteurs sourient. Signe d’une approbation ou plutôt une manière de nous dire que de Tamentit, nous les « étrangers » l’on ne connait que les légendes ?
Tamentit, cette cité mythique, continuera de dormir sur ses secrets enfouis…