«Mdjembrine» est le pluriel du mot Mdjambar. Un mot du dialecte local hassaniya parlé par les maures et les hratines, notamment en Mauritanie, au Nord-Mali et au Sahara occidental. Il signifie littéralement «marron», pour parler de cet esclave qui, défiant toute la société esclavagiste, sort de la domination de son maître.
Avec ce nouveau type de protestation, les abolitionnistes provoquent un électrochoc. Ce qui, ostentatoire soit-il, constitue en soi un rameau d’olivier destiné à toutes les communautés mauritaniennes, y compris leurs maîtres d’hier. Ils n’ont pas recouru à la violence, fissuration ou sabotage. Malgré que les principaux leaders d’IRA-Mauritanie se trouvaient, au moment des protestations, sous poursuites judiciaires: mise en dépôt, en détention ou sous contrôle judiciaire.
Par ailleurs, des activistes hratines ont organisé des scènes de revive des principales activités économiques chez les hratines.
D’une pierre, deux coups : d’abord, afficher la fière appartenance à un passé pas forcément glorieux, et, ensuite, appeler à la valorisation des activités socioéconomiques des anciens esclaves. Cet esprit de militantisme dément les rumeurs véhiculées par certaines sphères qui préfèrent le statu quo. Des rumeurs qu’ils argumentent par la radicalisation, depuis quelques années du discours antiesclavagiste.
Meïmouna Mint Saleck, membre de la Commission communication du Manifeste des Droits économiques, politiques et sociaux des Haratines, déclare que l’idée vient dudit manifeste. Selon elle, les leaders du manifeste avaient proposé, lors de la préparation de sa marche du 29 avril 2014, l’organisation de telles scènes. Mais, ajoute-t-elle, «nous avions eu des soucis de sécurité des foules qui l’auraient revécus».
Pour sa part, la chercheure et professeur de sociologie à l’Université de Nouakchott, Marième Mint Ahmed, qui supervise une thèse de doctorat sur le mouvement des hratines, dit que le Med’h (louanges folkloriques du Prophète) constitue une particularité artistique des hratines qui auraient vécu des violations multiples à différents niveaux. Selon elle, le Med’h est l’expression artistique des souffrances en question. Des souffrances liées souvent à des liturgies temporelles et spatiales précises.