Née le 08 juillet 1971à Tombouctou, Lalla Tahara HAIDARA attrape la poliomyélite en 1977. Après des années de combat contre la maladie à Tombouctou, dans les CHU du point G, Gabriel Touré à Bamako et dans un hôpital chinois à Kati, elle retrouve à peine la motricité. Ce qui lui causera un retard dans sa scolarité.
Courageuse, elle a fait des études modestes pour obtenir des diplômes. Elle se bat pour être productive malgré le contexte difficile de l’emploi. Lalla a pu surmonter ces difficultés et obtenir un diplôme de Secrétaire- Comptable en 1990.
Infatigable dans la recherche d’emploi, ses demandes ont fait l’objet de plusieurs rejets à cause de son handicap. Mais cette marginalisation ne la frustre point car son rêve est de prouver à la société de Tombouctou que les personnes handicapées peuvent aussi être productives et se prendre en charge.
Devenue une personnalité en vue à Tombouctou, elle organise les femmes handicapées en association pour leur insertion dans la vie économique. Dans sa hargne de démonstration aux conservateurs qui pense que le handicap est une malédiction divine, Lalla crée l’Association des Femmes Handicapées de Tombouctou en 1998 avec une vingtaine de femmes. Elle a œuvré et obtenu la construction d’un centre de formation pour les femmes handicapées.
Ce centre avant sa fermeture en 2012 début de la crise, a formé plus d’une centaine de femme en couture, en préparation de savon liquide, en gestion de petite entreprise. Cette action a changé la mentalité des autorités, des élus et même de certains conservateurs vis-à-vis du handicap.
Il a permis aux handicapées d’accéder aux crédits pour financer des activités génératrices de revenus(AGR). Elle a pu obtenir pour les femmes les plus vulnérables des chaises roulantes et des motos adaptées aux handicapées. Elle a été à la base de plusieurs prises en charge médicales mais aussi des interventions chirurgicales pour certaines malformations.
La crise sécuritaire au Nord est venue arrêter les activités de son centre. Mme Cissé s’est déplacée à Bamako avec sa famille mais a continué à œuvrer pour soutenir les membres de son association qu’ils aient émigré vers le sud ou qu’ils soient restés à Tombouctou.
Dans le souci de combattre le chômage, elle crée de l’emploi, en ouvrant un restaurant-auberge appelé « Mahtaj »là elle emploie 6 personnes dont 4 femmes handicapées.
Comme tout citoyen malien consciencieux, elle a sa vision pour le règlement du conflit au Nord. Lalla Tahara dans un ton dur affirme que « les femmes sont les plus touchées par la guerre, parce que la plupart du temps, les hommes laissent les enfants à la charge des femmes. Pour le règlement on ne nous écoute même pas ». Cependant elle déclare « que la réalité est plus un problème de développement que des sentiments sécessionnistes ou indépendantistes ». Elle argumente « la vie est chère, pas de route un camion de marchandises peut faire une semaine en route ou même plus pour nous apporter atteindre Tombouctou ». Sur un autre plan, Mme Cissé dénonce le manque d’écoles supérieures pour nos bacheliers alors que tout le monde est conscient que la vie à Bamako n’est pas facile. « Moi en tant que personne handicapée je n’ai pas pu faire de grandes études parce que je ne pouvais pas continuer à Bamako parce que je n’ai pas de logeur ». Comme solution elle propose que l état prenne ses responsabilités et revoit le développement dans sa globalité, tout en accordant une grande place à la santé, à l’éducation, à l’eau et aux routes dans les régions du nord. (Sourire).
Pour elle, « les armes ont leur limite et ne pourront jamais nous apporter la paix réelle. Il faut se mettre ensemble à table pour discuter clairement le problème et aller avec l’approche communautaire pour son règlement ». Elle martèle : «en tant que mère je veux un Mali uni et prospère avec tous ses fils réconciliés du Nord au Sud dans une Afrique sans guerre et dans un monde pacifié.»
Je n’ai aucun complexe devant quiconque malgré, mon handicap qui me prive de certains mouvements déclare-t-elle avec émotion
Ce que ses fréquentations retiennent d’elle en plus de son humilité, c’est aussi son sourire, ses larmes devant des situations difficiles des autres et sa colère quand elle juge injuste.