Un de ces migrants habite à Nouakchott depuis 2009. Il est venu du Mali, de Kayes précisément. Il est père de 3 enfants. Il est porteur du virus VIH/SIDA depuis 9 mois. Il dit qu’il n’est pas responsable ni de proche ni de loin, de son sort. Sa femme est, selon lui, la première responsable. Elle lui aurait confié qu’elle travaillait comme prostituée, pendant que lui il travaillait comme gardien nocturne d’un complexe commercial nouakchottois.
Il poursuit: «Mon grand malheur c’est que personnellement je ne savais pas que je suis porteur du virus. Quant à ma femme, elle a découvert qu’elle est porteuse du virus lors des analyses médicales régulières qu’elle a faites lors de sa grossesse. Malheureusement pour nous, comme nous sommes étrangers, nous n’avons pas le droit d’accès à l’assistance médicale que le gouvernement octroie aux personnes atteintes des maladies graves. Nous sommes dans un pays qui n’accorde aucun traitement aux personnes vivantes avec VIH . C’est pour cela que nous pensons désormais à retourner chez nous où nous pouvons bénéficier de compassion plutôt que d’être punis par l’expulsion et l’exclusion».
Pour sa part, Fatimata Touré, migrante malienne à Nouakchott, déclare: «Pour les vaccins des enfants, nous en bénéficions comme les citoyens mauritaniens. Les femmes enceintes, elles aussi, bénéficient du même traitement que leurs consœurs mauritaniennes. Mais, quelques analyses seulement sont gratuites dans les hôpitaux publics et il n’y a pas d’ONGs qui aident les émigrés en Mauritanie».
Djibril Ouatara est migrant ivoirien. Il est âgé de 35 ans, dont il a passé 5 en immigration. Ouatara a tenté à plusieurs reprises d’émigrer vers l’Europe, mais en vain. Il fait la navette entre le Maroc et la Mauritanie, où il se nourrit grâce à son boulot de serveur de restaurants. Il dit: «franchement, les services de santé sont très modestes en Mauritanie. Les citoyens mauritaniens, eux-mêmes, voyagent souvent à l’extérieur pour se soigner. Mais, en ce qui concerne le traitement des migrants, je considère que la Mauritanie est plus clémente que les pays limitrophes».
Dr Marième Dia travaille dans un dispensaire gouvernemental à Dar Naïm, un quartier qui abrite beaucoup de migrants. Elle commente: «La propagation en continu de nombreuses maladies infectieuses chez des migrants, malgré notre lutte acharnée contre elles, prouvent que la contagion ne cessera. Pire, cette contagion pourra s’accentuer davantage dans certains pays. Ce qui démontre un besoin pressant de control pour lutter efficacement contre les infections dans la sous-région. L’émergence de certaines maladies importées de l’extérieur nous enseigne qu’il nous est très difficile de les combattre. Car, nous, en Mauritanie, ignorons la plupart de ces maladies et nous ne sommes pas capables de les identifier. Ce qui exige qu’il y ait des échanges d’informations et de coopération sanitaire entre notre pays et les pays d’origine des migrants».
Selon Dr Dia, les migrants qui se présentent à son dispensaire sont traités de la même manière que les citoyens mauritaniens: «nous ne leur demandons aucune pièce d’état-civil qui indiquerait leur identité» a-t-elle dit.
Elle poursuit: «la propagation des maladies entre les migrants peut être fatale. Elle a des conséquences désastreuses si d’autres facteurs s’y ajoutent: mauvaises conditions de vie, manque de prise de conscience chez les migrants, chez leurs employés ou chez le personnel de santé».
Pour Ibou Badiane, Secrétaire général de l’Union des Associations des Migrants de l’Afrique de l’Ouest en Mauritanie, «la migration en Mauritanie de citoyens subsahariens est forcée par les circonstances qu’ils vivent dans leurs pays respectifs. Souvent, des pays qui reçoivent des migrants de ces pays les accusent d’importer avec eux des maladies dangereuses et atypiques. Mais, ce n’est pas le cas pour la Mauritanie. Loin de ça, les migrants en Mauritanie donnent toujours leur sang à la Caisse nationale du Don du Sang qui a toujours découvert l’absence de toute maladie infectieuse chez eux. Certes, il y a des cas de migrants atteints par des infections. Mais ça reste à l’ordre des citoyens mauritaniens porteurs d’infections».
Pour sa part, un conseiller au Ministère mauritanien de la Santé affirme que «les autorités mauritaniennes suivent avec succès un Programme de dépistage sanitaire sur les régions frontalières qui servent de points d’entrée pour les citoyens subsahariens». «Nous espérons que cela limite au maximum possible la propagation des maladies infectieuses dont ces pays sont l’origine» a-t-il conclu.