Des groupes de jeunes ont vivement protesté contre le projet de loi. Ils ont voulu empêcher le Parlement de le débattre dans sa session d’avril 2014. Résultat: le gouvernement l’a retiré pour révision.
Les opposants de ce projet de loi disent qu’il porte une restriction des libertés, notamment son chapitre sur la cybercriminalité.
Me Mohamed El Mamy Ould Moulaye Ely, avocat aux cours mauritaniennes, pense que ledit projet de loi contient des articles vagues. Selon lui, le projet de loi est incompatible avec la loi de la presse en vigueur depuis 2006.
Mohamed Mahmoud Ould Tolba, membre du Bureau exécutif de l’Union des Blogueurs mauritaniens (UBM), considère que le projet de loi constitue un véritable recul en termes des libertés, et que le pouvoir tentera de s’en servir pour affaiblir ses adversaires. Il dit que l’application de ce genre de lois sera très difficile, vu les moyens très limités du pays. Selon lui, ce projet de loi, une fois adopté, sera exploité pour régler les comptes avec les détracteurs politiques. Ould Tolba et l’UBM rejettent l’utilisation par le projet de loi de termes interprétables et incriminés par le texte, genre «le discours offensif de l’autre» et/ou «les bonnes mœurs».
Ould Tolba énumère dans ce projet de loi des sanctions excessives par rapport aux délits d’édition. Ce projet de loi est même plus sévère que le Code pénal, a-t-il laissé entendre.
Dr Mohamed Lemine Ould Echvagha, médecin et activiste, pense que «le projet de loi des 3 M» révèle une approche officielle du gouvernement pour sévir les libertés, en particulier celles des médias contemporains et du citoyen journaliste, «et ce après l’échec de toutes ses tentatives visant à les contenir».
El Hacen Ould Sidi, blogueur, parmi ceux qui ont manifesté contre le projet de loi, pense que «le but de cette loi est de mettre un terme aux activistes sérieux sur les réseaux sociaux et qui sont pionniers de la lutte contre la gabegie financière, politique et judiciaire du système; car, ils disposent de plus de capacité pour mobiliser et mettre en exergue la médiocrité du régime en place».
Bien que notre interlocuteur reconnaisse l’incapacité pour le pouvoir de contrôler toutes les activités électroniques, il dit que la situation exige tout de même une autre campagne similaire à celle qui a poussé le gouvernement, il y a 2 ans, à faire une volte-face.
Toutou Mint Ely Salem, Directrice des législations au Ministère des NTICs, et responsable directe de la rédaction de la loi, dit que ce projet de loi vient en réponse à un besoin récurrent dans une conjoncture marquée par l’expansion du champ informationnelle en Mauritanie et ailleurs. D’après elle, le projet de loi tient à préserver les libertés publiques, notamment celle d’expression, dans leurs infranchissables limites légitimes et légales.
Mint Ely Salem ajoute que l’actuel projet de loi sur la cybercriminalité a été rédigé après des séries de concertations avec toutes les parties concernées, notamment les journalistes et intellectuel et que leurs points de vue ont été pris en compte.
Le nouveau projet de loi, constitué de 51 articles en 11 chapitres, doit être transmis au Parlement dans sa session du mois de novembre prochain. Ceci aurait lieu malgré l’objection des jeunes blogueurs mauritaniens. Malgré cela, certains le tolèrent. Ils y voient un malheur nécessaire face au chaos qui caractérise le domaine de l’édition et vu l’absence d’une loi qui met en terme les abus de publication.