Les conséquences de cette longue et douloureuse pénurie d’eau se sont déjà fait sentir à travers le desséchement graduel de la nappe phréatique (à l’origine de la rareté de l’eau potable), la disparition des eaux de surface avec comme conséquences : Un exode massif des populations, un cheptel qui se décime à petit feu, une disparition progressive de l’agriculture vivrière et un desséchement des palmeraies sources de vie et raisons d’être des populations locales.
Selon Ould Mohamed de la localité de Tentemlel, actuellement la tonne d’eau s’y négocie à 6000 UM ( l’équivalent de dix jours de salaire d’un enseignant titulaire). Pourtant malgré ce prix exorbitant, la seule eau proposée à la vente aux populations est, selon lui, une eau saumâtre dont la consommation expose à des problèmes de santé (des calculs rénaux).
Pour Sidi Ould Lemine, c’est également le même problème qui se pose au niveau de la localité de Touajil : « Depuis bientôt quatre ans l’eau dont nous nous abreuvons est d’un goût salé très prononcé. Malgré les nombreuses réclamations que nous avons introduites au niveau de l’administration, notre situation ne s’est pas améliorée pour autant. Je suis chef de village de la localité de Touajil et c’est pour cette raison que je continue à nourrir l’espoir que les choses pourraient s’améliorer un jour et grâce à la clémence divine, l’eau y coulera, de nouveau, à flot. D’autres qui sont moins liés à cette localité que moi, sont déjà partis vers d’autres horizons. Ils ont, certainement, raison d’agir de la sorte car sans eau aucune vie n’est possible à Touajil comme ailleurs » regrette-t-il.
Med Lemine , un des notables de la collectivité des Ideyboussatt d’Imoudrane affirme que les palmeraies des habitants de cette localité, jadis florissantes, ont été, pour la plupart, anéanties. « Seules 8 à 10 palmeraies résistent encore, les autres ont été décimées par l’action conjuguée de la sécheresse, le manque d’eau et l’ensablement. Ces palmeraies permettaient aux populations de pratiquer à la fois la phoeniciculture, le maraichage et la culture céréalière » déplore-t-il.
Un peu plus à l’Est au niveau de la zone Tichitt –Aghreyjit, la situation est nettement meilleure. Plusieurs sondages y ont été forés par un bienfaiteur (on parle ici du député de Tichit) pour permettre aux populations de cet axe et leur bétail de s’abreuvoir. Mais, il n’empêche qu’ici aussi, du fait de la sécheresse et l’absence des eaux de surface, les habitants déplorent la disparition progressive de leur agriculture, leur élevage et surtout la principale activité dite chasse vivrière pratiquée par les Namady. « La Gueymare (campagne de chasse étalée sur plusieurs mois) a disparu faute de gibiers. Les hommes qui la pratiquaient sont partis s’installer à Nouakchott où ils vivent difficilement. Parmi eux, très rares sont ceux qui reviennent. Au contraire au bout d’un certain temps c’est le reste de la famille (femme et enfants) qui les rejoint fuyant la misère et les aléas de la vie » se lamente MGhainy, la cheftaine de Nemady de Tichitt.
Après avoir sillonné les localités relevant de sa commune, le maire de Tichit Mohamed Ould Teyah reconnait que les populations sont réellement très accablées. « Je confirme que l’eau consommée à Tichit est d’une forte teneur en sel. Les populations de cette localité sont obligées de se rabattre sur les puits artisanaux. A Aghreyjit le problème est plus sérieux. Dans cette localité l’eau est presque introuvable. Les habitants se déplacent à des dizaines de kilomètres pour s’en procurer. En plus, l’eau pastorale n’existe nulle part, ce qui pousse les éleveurs à se déplacer à des centaines de kilomètres pour abreuvoir leurs animaux au niveau des points d’eau (sondages) dont le débit devient de moins en moins important. Je suis presque sûr que si l’hivernage ne tient pas ses promesses cette année, plusieurs localités risquent de se dépeupler et d’autres disparaître tout bonnement. Je pense que le ministère de l’Hydraulique et l’Assainissement doit réaliser des études géophysiques sérieuses afin de connaitre le potentiel hydrique de la zone, l’emplacement des nappes (si nappes il y a), la teneur et la qualité de leurs eaux » devait-il indiquer.
Le directeur régional de l’Hydraulique et l’Assainissement chargé du Tagant, Mohamed Ould Kory reconnait, lui –aussi, que l’axe Tidjikja-Tichitt est la zone la moins arrosée de la région. Il n’empêche que, selon lui, d’importantes réserves en eau douce se trouvent dans le Dhahr (étendue montagneuse ceinturant le versant Est de la province du Tagant). « Contrairement à ce qu’on pourrait penser, la zone en question n’est pas un biseau sec, elle renferme d’importantes quantités d’eau parmi la plus douce avec une très faible teneur saline. Avec l’exploitation de la nappe Dhahr les populations vont boire à satiété et les activités agropastorales vont reprendre.
En Mauritanie deux grands projets du genre ont déjà vu le jour, il s’agit de l’Aftout Essahili qui prend sa source du fleuve Sénégal et qui alimente plusieurs villes de la Mauritanie dont la capitale Nouakchott avec son million d’habitants et le projet Dhahr de Hodh Echargui (en cours de finition) qui alimentera des centaines de milliers de personnes et leurs animaux. Espérons que le Dhahr Tichitt sera le troisième projet du genre que les pouvoirs publics vont lancer pour le grand bonheur des populations de Tichit et environs » déclare Ould Kory sur une note d’optimisme.