Et bien qu’on attribue généralement la responsabilité aux arabes « Bidhan », accusés d’esclavager les Haratin « anciens esclaves », ce phénomène est également très répandu dans les trois communautés noires (Wolofs, Soninké et Poulaars), mais la couleur unifiée a contribué à dissimuler la souffrance de plus de 40 mille personnes souffrant d’un esclavagisme abominable.
« Tandia Moussa », appartenant aux esclaves de Poulaar, nous a confié que les nobles de sa communauté, les Sibi, exercent un esclavagisme féodal sur les « Maoubou Soudou Bati », « Hachiat Al-Falan », « Soutibi », « Makoubi » et « Halvabi ». Il affirme que ces derniers n’ont pas le droit de s’assoir à la même table que leurs maitres. Ils ont également leurs propres cimetières. Chez les « Poulaars », enterrer les maitres avec les esclaves est une insulte aux morts des nobles.
« Les esclaves de ma communauté travaillent encore dans les champs des maitres, sans rémunération et loin des regards », a-t-il précisé.
Le sociologue « Aldaw weld Ahmadnah » a indiqué que les droits de l’Homme sont bafoués dans les communautés noires, affirmant que des atteintes graves aux droits de l’Homme sont commises dans les régions du sud, sans que les organisations des droits de l’Homme n’interviennent.
De son côté, l’ancien adjoint du président du « Mouvement Ira » qui défend les droits des esclaves, Mohamed Fal weld sid Milah estime que l’esclavagisme est très ancien au sein des communautés noires.
Weld sid Milah a indiqué que les Arabes ne sont pas les seuls responsables de l’esclavagisme en Mauritanie. Les rois Fouta (des nobles de Poulaars) ont été les collaborateurs les plus importants des marchands d'esclaves Bidhans (blancs) et Européens.
« Les Kir de la communauté des Wolofs persécutent toujours les Jambour et les Noul. Ces derniers sont issus, selon les légendes wolofs, du mariage d’un homme mort avec une femme vivante. C’est pour ceci que le mariage entre une personne appartenant à ce groupe avec une autre personne issue de n’importe quelle autre groupe est strictement interdit », a-t-il expliqué.
Il affirme que les « Ininyou » subissent le même supplice dans la communauté des Wolofs qui sont plus injustes encore envers les « Jam » et tous ses sous-groupes.
Les Guerriers des « Hourou et Moudini » pratiquent les mêmes atrocités chez les Soninkés sur les « Niakhamalani », les « Koumou » et les « Diounkourounkou ».
Les experts en affaires mauritaniennes affirment que des violations flagrantes des droits de l'homme sont commises dans la région de l'Ouest au bord du fleuve du Sénégal, y compris les pratiques racistes et la discrimination par la naissance.
Les organisations de droits de l’Homme tentent, avec l’appui du gouvernement, de défendre les victimes, mais faire porter le chapeau aux Arabes a engendré une division au sein d’Ira, la plus grande organisation locale qui défend les droits des esclaves. Son président adjoint, docteur Saâd wel Loualid, accuse ses camarades d’excès de zèle militantiste en s’attaquant uniquement aux Arabes et en oubliant, des décennies durant, les atrocités commises par les communautés noires.
Le gouvernement de Mauritanie a adopté, en 2014, en collaboration avec les Nations-Unies, un plan d’action officiel, d’un budget de 3,3 millions de dollars, pour lutter contre l’esclavagisme à l’horizon de 2016. Un tribunal spécialisé dans les affaires d’esclavagisme a été créé.
Cette feuille de route comporte 29 recommandations couvrant les aspects économiques, sociaux, éducatifs, de droits et de connaissance en rapport avec cette cause. Elles devront être concrétisées, comme le stipule l’accord, dans quelques années, selon la commission de solidarité.