La preuve, Iyad Ag Ghaly, le fondateur du groupe islamiste armé Ansar Dine, et ses disciples courent toujours malgré les moyens à la disposition des forces françaises et de la Minusma.
A première vue, Ag Ghaly peut remercier les Dieux du Sahara de lui avoir épargné le même sort qu’Abou Zeid, ex chef d’AQMI ou encore d’Abdelkrim Al Targui, morts sous les assauts répétés de Serval. Selon le journaliste et écrivain nigérien Seidik Abba, la longévité d’Iyad n’est ni plus ni moins que la résultante d’une entente entre les puissances dominantes de la région, à savoir Alger et Paris. Dans son article publié dans les colonnes du Monde Afrique, l’on apprend que cet accord daterait de 2014 alors que les soldats français avaient en ligne de mire Iyad Ag Ghaly.
Pourtant, Iyad Ag Ghaly a été régulièrement présenté comme un hors-la-loi notoire et accusé d’être fortement impliqué dans la déstabilisation du Mali en 2012. Il a été même qualifié à un certain moment comme l’ennemi public numéro 1 dans la région. Mais, cela n’aurait pas empêché les puissances régionales de l’épargner pour des considérations politiques. Et si les Algériens ont toujours prôné une logique de résolution pacifique de la crise malienne, c’est loin d’être la position française qui prétend une lutte ouverte contre le terrorisme au Sahel.
Les rapports recoupés des services de renseignements occidentaux, sur la situation au Mali, indiquent qu’en 2014, Iyad Ag Ghali et ses disciples seraient à portée de main des forces françaises, qui auraient pu même le capturer vivant. Toutefois, comme Paris et Alger se concertaient avant de telles décisions, Alger aurait expressément signifié à l’Elysée que le cas Iyad est son affaire à elle, et de ne point s’en mêler. La suite est tristement connue. Iyad a su profiter du chaos de la débandade des groupes terroristes pour se fondre dans les sables mouvants du désert malien. Désormais, il est tel un dromadaire. L’on voit ses traces mais l’on ne l’aperçoit jamais, surtout qu’une large zone du Nord du Mali est un domaine hors-loi.
Il semble peut-être anormal que les analystes et les observateurs parlent d’Alger et de Paris, alors qu’ils traitent une problématique concernant un Malien opérant des actes répréhensibles par la loi sur son territoire national. Eh bien, il n’échappe à personne que l’Algérie exerce sur le Mali une sorte de parrainage. Les différents accords de paix signés entre les rebelles et le gouvernement du Mali se sont opérés sous l’égide de l’Algérie et peuvent démontrer le poids de ce pays au Mali. Paris aurait donc jugé qu’il serait judicieux de contacter le parrain plutôt que le parrainé, pourtant Etat souverain.
Mais, une telle situation impacte dangereusement la sécurité de la zone, puisque des hors-la-loi jouiraient d’une « garantie d’impunité », alors qu’ils continuent à semer la zizanie dans la région. Or, Alger et Paris ne seraient pas de cet avis, concernant le réseau de Ansar Dine et de son chef Iyad Ag Ghaly, très influent au Sahel. lequel réseau aurait été déterminant pour la libération d’otages. Les rapports parlent des fameux otages d’Arlit, voire même la libération des diplomates algériens enlevés en avril 2012 à Gao. En échange de cette délivrance, plusieurs disent qu’Ag Ghaly s’en serait servi pour négocier une immunité pour lui et ses hommes. Une information qui trouve de plus en plus crédit car il est difficile de comprendre que l’armée française, avec tous les moyens qu’elle dispose, ne parvienne pas à localiser ce groupe armé. Officiellement, la grande muette de l’Hexagone ne communique point sur son cas alors que l’on sait que le Mali et les Etats-Unis le recherchent activement.
Cela veut dire qu’Algériens et Français ne veulent pas se mettre à dos un puissant chef armé, tribal et extrémiste, dont ses réseaux et ses cousins germains ont permis la résolution de plusieurs périls. En effet, les ifoghas ont pris une part importante dans la libération d’otages français au Sahel entre 2012 et 2013. Ils ont aussi joué un rôle prépondérant à la libération des diplomates algériens enlevés en avril 2012 à Gao. De plus, l’Algérie fortement traumatisée par sa « décennie noire » qui fit plus de 60 000 victimes, craint énormément le spectre de l’extrémisme armé à tel point qu’elle œuvre pour maintenir le plus possible hors de ses frontières toutes velléités armées terroriste.
Une autre information ressort des rapports des services de renseignements, Iyad Ag Ghaly est un puissant chef tribal dont les siens espèrent toujours qu’il devienne fréquentable. Selon Lemine Ould Salem, auteur de Le Ben Laden du Sahel : sur les traces du djihadiste Mokhtar Belmokhtar, le statut du chef traditionnel d’Iyad expliquerait aussi le fait qu’il échappe à tous les radars. En attendant son hypothétique retour dans les rangs de la tribu des Ifoghas ou de son arrestation par une force militaire, Iyad continue d’arpenter la zone algéro-malienne du nord du Mali. Toutefois, ce sont les citoyens paisibles qui paient les frais.