L’enseignement est, par la force des choses, touché à Kidal, au Nord du Mali suite à la persistance de l’insécurité dans la ville et les régions environnantes. Déjà, l’année dernière, sur les 67 écoles existantes, seulement une vingtaine d’écoles a ouvert ses portes. « Nous avions plusieurs problèmes qui empêchent un déroulement normal de la scolarité, comme l’infrastructure qui ne s’y prête pas ou le manque flagrant de personnel enseignant », selon le directeur de l’école Ag Mohamed.
« Comme il est facile de constater, les salles de classes sont carrément détruites dans plusieurs écoles de Kidal. Dans d’autres, ce sont les bancs et les tables qui sont cassés, sans parler du déficit flagrant d’enseignants », regrette-t-il en constatant que les enfants trainent dans les rues, au lieu de fréquenter les écoles.
Pour les parents, l’insécurité est le principal handicap. « Malgré l’accord de paix signé depuis plus d’un an, la tension persiste dans la région et les groupes armés font la loi dans la ville et ses environs. Les familles ne peuvent pas se permettre d’envoyer leurs enfants dans les écoles, de peur que des incidents n’éclatent entre les fractions rivales », raconte Ahmed Ag Ahouchel, un parent de deux élèves fréquentant une école de la ville.
Ce dernier appelle l’Etat à intervenir. « Il est grand temps pour que l’Etat intervienne pour imposer la sécurité dans la région et garantisse les conditions nécessaires pour la reprise de la vie courante, à l’image de l’approvisionnement en électricité ou le suivi de la scolarité et des services de la santé », ajoute-t-il. « C’est comme cela que l’Etat assure l’adhésion des citoyens à sa politique », conclut-il.
L’inquiétude ne se limite d’ailleurs pas aux parents d’élèves. Le syndicat des enseignants locaux a adressé une requête aux autorités centrales à Bamako, pour les solliciter de renforcer la sécurité en ville et assurer les conditions matérielles pour la reprise scolaire. Le syndicat regrette les conditions inappropriées de l’année scolaire 2015 / 2016 avec des cours dispensés aux enfants dans les cours de écoles. « Nous avons préféré de nous porter volontaires pour tenir les enfants en classe et ne pas leur faire perdre l’année scolaire 2015-2016. Mais, face à l’insécurité, nous ne pouvons rien », indique Rhissa Ag segdi, un enseignant, qui appelle les différents groupes armés à une entente servant d’abord les intérêts de la population locale.
Pour leur part, les élèves déplorent cette situation. L’élève du lycée, Baye Ag Mohamed, déclare que « les principaux perdants dans cette histoire, ce sont les élèves. Notre avenir est compromis après des années loin des bancs scolaires. Malheureusement, ni le gouvernement central de Bamako, ni la coordination des mouvements de l’Azawad (CMA) ne semblent être conscients de l’ampleur de la crise qui nous frappe », regrette-t-il, aux bords des larmes.
L’administration locale est, elle-aussi, consciente de cette situation précaire frappant la région de Kidal et touchant de plein fouet les enfants et les jeunes de la ville. Ainsi, le coordinateur de la commission des gestions et d’administration de la ville, Zeyd Ag Mohamed, n’a cessé de coordonner avec l’UNICEF et les autorités centrales à Bamako, afin d’assurer la reprise des cours. L’UNICEF poursuit son engagement d’assurer la formation d’enseignants volontaires, la réhabilitation des écoles, la garantie de la fourniture scolaire et la prise en charge d’une cantine scolaire. Mais, la question de la sécurité freine tout le monde. « Nous espérons que la situation sécuritaire s’améliore dans les prochaines semaines pour assurer la rentrée scolaire au courant du mois d’Octobre », dit-il, ne parvenant point à cacher ses craintes.
La région de Kidal n’arrive pas à vivre normalement, quatre ans après la crise de 2012. Tous les services n’ont pas repris dans la ville, à l’image des prestations sanitaires ou l’approvisionnement en carburant et en électricité. En l’absence de ces commodités, les habitants de la région s’interrogent sur la capacité réelle du gouvernement central d’instaurer la paix dans la région.