En octobre 2016, aucune zone n’est épargnée, même pas celles abritant les troupes onusiennes de la MINUSMA, la force française Barkhane ou les forces armées maliennes. La population civile continue à vivre dans l’insécurité.
Cette tension n’a pas empêché les belligérants maliens, signataires des accords d’Alger et de Bamako, en 2014 et 2015, de continuer à confirmer leur attachement à ces accords. Toutes les parties en conflit n’ont cessé d’affirmer leur « rejet de la violence, comme moyen d’expression politique » et leur « attachement au dialogue et à la concertation pour le règlement des différends ».
Ce double-langage des groupes armés et des dirigeants politiques a énervé les citoyens du Nord du Mali qui ne croient plus à ces propos, répétés tout le temps, sur « le respect de l’unité nationale, de l’intégrité territoriale et de la souveraineté de l’État du Mali, sa forme républicaine et son caractère laïc ».
L’enseignant Souleymane Ag Issa, habitant les environs de Tomboktou résume le mécontentement des citoyens en affirmant que, contrairement à ce que prétendent tous les chefs politiques et dirigeants des groupes armés : « l’ordre républicain continue d’être ignoré dans toutes les localités du Nord du Mali, avec une absence criarde de la souveraineté de l’État sur cette partie du territoire national ».
Souleymane ajoute que : « l’armée et l’administration sont absentes dans plusieurs localités du Nord et ce sont les groupes armés qui continuent à faire régner la terreur au sein de la population civile comme ils l’ont toujours fait auparavant ».
L’enseignant attire par ailleurs l’attention sur la recrudescence du banditisme dans la région avec la multiplication des enlèvements de véhicules, notamment celles des ONG, et le dépouillement de leurs passagers, comme ce fut le cas pour un véhicule de l’ONG ‘Action contre la faim’, qui a été enlevé à Gao. « Le banditisme n’est certes pas nouveau dans la région. Mais, il s’est développé ces derniers temps, avec l’absence des forces sécuritaires sur la majorité des axes routiers », précise-t-il.
Souleymane s’inquiète surtout du phénomène de rapt, qui commence à voir le jour au Nord du Mali et touche désormais des habitants locaux, notamment des enfants. L’enseignant rappelle du récent kidnapping des enfants de Mohamed Ousmane Ag Mohamédoun, l’ancien ministre de la Cohésion sociale. Des sources bien informées affirment que la libération de ces enfants a été faite contre le paiement d’une rançon. « Toutes les composantes de la société malienne doivent se dresser de toutes leurs forces contre de telles pratiques abjectes », s’insurge l’instituteur, qui ne parvient pas à comprendre ce que font les forces maliennes, françaises et internationales, si la plus simple des taches, à savoir la quiétude des citoyens, n’est pas assurée.
Une source sécuritaire, proche des Nations Unies à Kidal, affirme que : « la recrudescence des actes de banditisme s’explique par la lenteur dans le processus de cantonnement, intégration et désarmement, démobilisation, et réinsertion (DDR) des groupes armés. Cette lenteur a causé la désertion de dizaines de miliciens dont les groupes armés n’arrivent pas à entretenir. Lesquels miliciens sont devenus des bandits et appliquent l’imposition ou le racket à la population locale ». « Cela n’occulte pas, bien-sûr, le banditisme subsistant. Mais, la lenteur de l’application du DDR explique la recrudescence du banditisme », ajoute la même source.
La situation sécuritaire précaire au Nord du Mali dépend surtout des faibles moyens humains et logistiques au service de l’Etat malien et des forces internationales. Les citoyens souffrent en raison de cette faiblesse. « Nous nous résignons aux exigences des groupes armés, même s’il s’agit d’extrémistes, parce que nous ne disposons d’aucune protection », reconnait un habitant de Goundam.
La quiétude n’est pas pour demain au Nord du Mali