En effet, malgré leurs incessantes revendications en vue d’améliorer la situation dans la région à travers la création de nouveaux centres médicaux et de cliniques équipées, le Ministère de tutelle continue à faire la sourde oreille, laissant les malades s’entasser dans les deux seuls établissements disponibles : le Centre de Bimi et l’Hôpital Central.
« Je me demande pour quelles raisons les services de santé sont aussi mauvais dans une ville aussi grande et aussi historique que Tombouctou, tandis que la situation dans de petites villes telles que Siko est de loin meilleure », s’interroge Karba Madou Traoré, pharmacien à la retraite. Traoré raconte également la surprise qu’il a eue un jour, lorsque, voulant se faire examiner à l’Hôpital Central, on lui a répondu qu’il n’était pas possible de faire les examens médicaux pour lesquels il était venu parce que le médecin radiologue était absent et qu’il n’y avait personne pour le remplacer !
Notre interlocuteur affirme n’être pas le seul à s’être déplacé à l’hôpital pour voir ce médecin ; beaucoup d’autres patients ont eu à essuyer la même déception dans cet établissement médical à forte affluence, le seul de la ville, qui est plus connu sous le nom d’« Hôpital de Tombouctou ». Traoré se plaint aussi de l’attente interminable que subissent les malades qui doivent se tasser dans de longues files devant le bureau de l’assistant du docteur dans l’espoir de se voir délivrer un bon de consultation. Et une fois devant le médecin, ils sont déjà épuisés lorsqu’ils ne se voient pas obligés d’y retourner une autre fois. « L’hôpital manque également d’équipements médicaux modernes ; tous les appareils qui s’y trouvent sont très vétustes et ne donnent pas de valeurs exactes, en particulier lorsqu’il s’agit de prendre la tension artérielle, ce qui représente bien entendu un risque important pour la santé des patients, notamment les hypertendus d’entre eux ».
Traoré finit par lancer un appel au Ministère de la Santé pour qu’il renforce le contrôle des centres médicaux de la région afin de remettre à niveau les services qu’ils offrent.
Docteur Othman Miga, responsable au sein de la Direction Régionale de la Santé de la ville de Tombouctou, confie à ce sujet : « Le gouvernement fait du mieux qu’il peut pour moderniser le secteur de la santé à Tombouctou mais tout le monde sait que depuis quelques années, nous traversons une crise sans précédent qui a eu des conséquences directes et indirectes sur tous les secteurs. D’ailleurs, sans l’aide de nos partenaires au sein des organisations humanitaires internationales, nous n’aurions pas même pu assurer le peu de services que nous offrons actuellement, du fait de l’insécurité régnante dans la région et à cause du fait que les biens de l’état soient sans cesse attaqués par des groupes armés anonymes ».
Fatima Cissé se tient assise sur son lit dans une salle de soins du centre Bimi. Atteinte d’un cancer du sein, elle se plaint de la lenteur des rendez-vous et du désordre qui sévit dans les services médicaux du centre en disant : « J’ai longtemps souffert le martyre dans les couloirs de ces hôpitaux et de ces centres médicaux où l’on s’entasse toujours dans l’attente interminable de rendez-vous qui ne viennent jamais et à la recherche de médicaments introuvables ». « J’achète donc tous mes médicaments dans une pharmacie à l’extérieur du centre médical, sans compter ce que je dois donner au médecin pour payer la consultation… », ajoute-telle.
Notons que le maire de la ville, Hali Othmane Cissé, avait avoué dans des déclarations précédentes qu’il n’était pas très satisfait des services médicaux présentés dans le Nord d’une manière générale et dans la ville de Tombouctou plus particulièrement. C’est la raison pour laquelle les habitants placent tous leurs espoirs dans la création de centres médicaux privés. Aussi le maire a-t-il appelé les hommes d’affaires à investir dans le secteur de la santé, expliquant que « le progrès et la modernité ne peuvent venir que de la collaboration des services privés et des services publics ».